Le serpent (Premiers Ecrits – Luc RENDERS)

 

LE SERPENT

 

A cause du grand soleil,
Toi, Belle, tu sommeilles.

Tu te reposes dans un coin d’ombre,
Sous la verdure de grands arbres ;
Tu ressembles à un marbre,
Ta respiration est douce, et tu sombres
Dans une rêverie où tu languis.
Tu sens en toi un feu qui grandit ;
Tu cherches les sons, les couleurs, les sens, la lumière, l’absolu,
Ce qui pourrait ressembler à ce paradis perdu.

Pas très loin, dans la pénombre des feuilles humides,
Un serpent tranquille, vert et jaune, qui dormait,
Te regarde, t’observe de sa tête ovoïde,
S’avance et se demande ce qui a troublé sa paix.
Toi, belle Danaïde, ton corps bouge, se meut,
Un léger soupir soulève ta poitrine.
Le serpent, sur ta tunique blanche, comme un jeu,
Se souvenant de l’Origine,
Rampe de tout son long, suit les courbes de ton corps presque nu ;
Comme une feuille dans le vent,
Tu frissonnes dans ta vertu ;
Le serpent goûte les joies d’un corps qui se restitue,
Te mord et te tue de son venin ardent.

A quoi rêvais-tu, Beauté d’Albâtre ?

07/95